« Je pratique l’agroforesterie… »

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Les arbres et les haies occupent une place centrale sur l’exploitation de Stéphane BRODEUR, convaincu des intérêts multiples que cela génère.

Plusieurs kilomètres d’arbres et de haies au milieu de la plaine. Les champs cultivés par Stéphane Brodeur sur la commune d’Houdilcourt (Ardennes) se repèrent de loin. Installé depuis 1997 et à la tête d’une exploitation céréalière de 230 hectares conduite en agriculture biologique, l’exploitant s’est lancé dans l’agroforesterie en 2015, après s’être formé pendant trois années. Pour ce passionné du vivant, ce projet de plantation, dont le coût est de 1500 euros l’hectare, a pu voir le jour grâce à un accompagnement financier de la part de l’entreprise Engie Green (voir encadré).

RÉÉQUILIBRER LE MILIEU

« Je souhaitais rééquilibrer le milieu et replacer les arbres là où ils auraient toujours dû être. Ils permettent à un écosystème de se mettre en place, mais aussi de lutter contre le réchauffement climatique, estime l’agriculteur. Des champignons se forment au niveau des racines, des insectes apparaissent au niveau du tronc et du bouquet foliaire et certains oiseaux et animaux de plaine refont surface. » Accompagné par la fédération de chasse du département, Stéphane Brodeur a implanté des arbustes entre les arbres pour créer d’autres niches écologiques.

A la fin de l’année, 50 hectares de l’exploitation seront conduits en agroforesterie. « Nous plantons des arbres tous les six mètres, espacés de trente mètres pour pouvoir passer avec le tracteur et les différents engins. L’emprise au sol d’une telle installation représente 10 % de la surface de la parcelle. » Selon Adrien Balcerowiak, conseiller à la chambre d’agriculture des Ardennes, l’installation d’une infrastructure en agroforesterie nécessite d’y consacrer un peu de temps. « Quinze heures de travail par hectare l’année de plantation et cinq heures par hectare et par an les années suivantes, avec un pic d’activité les quinze premières années. »

Merisier, érable, charme commun, noyer, tilleul, aubépine, cormier… Les essences qui bordent les champs de Stéphane Brodeur ont été choisies en fonction du territoire. Pour éviter de concurrencer les cultures présentes sur les parcelles, il fait en sorte que les racines ne gagnent pas trop de terrain. « Je sous-sole avec une dent de soixante centimètres pour que les racines plongent en profondeur et aillent chercher l’azote qui se lessive », explique l’agriculteur, qui pratique le semis direct sous couvert et limite le travail du sol sur ses parcelles.

CAPTER DU CARBONE

Selon l’exploitant, les arbres apportent un autre avantage très vertueux : la captation du carbone dans l’air, mais également dans le sol grâce aux racines. « Lorsque les arbres auront atteint leur taille maximum, autour de douze mètres, j’estime qu’un hectare d’agroforesterie permettra de capter 2,5 tonnes de CO2 par hectare et par an en moyenne. »

Stéphane ne constate pas pour le moment de concurrence entre les arbres et ses productions. « Ce sera sûrement le cas d’ici vingt ans sur les cinq premiers mètres des parcelles où les racines s’étendront. L’ombre apportée sera alors peut-être plus un avantage qu’un inconvénient si on continue de connaître des saisons si sèches. »

BERTILLE QUANTINET

La France Agricole // 3980 // 4 Novembre 2022

(ENCADRE)

PROJET ENGIE GREEN
L’étude d’impacts menée par Engie Green pour implanter un parc de huit éoliennes dans le sud du département des Ardennes a mis en évidence une potentielle perte d’habitat pour l’avifaune nicheuse environnante. pour compenser les conséquences d’un tel projet sur la biodiversité, l’entreprise a développé plusieurs programmes dans un rayon de 30 km autour du parc éolien, dont de l’agroforesterie. Stéphane Brodeur a bénéficié d’une aide de 20 000 euros pour la plantation et signé une convention avec l’entreprise d’une durée de dix ans durant laquelle une indemnité annuelle de 2900 euros lui est versée pour compenser les pertes de surface occasionnées.

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